Pierre Boulez, chef et compositeur
Avoir 20 ans en 1945, c'était vouloir tourner le dos à l'immense gâchis de la guerre, vouloir oser toutes les utopies, toutes les audaces, toutes les ruptures avec un monde ancien pour rebâtir un univers nouveau. Dans une France musicale dominée par le néo-classicisme de Stravinsky, il fallait un chef de meute, qui se révèle habile à toutes les agit-prop pour bousculer l'ordre établi. Ce fut le rôle de Pierre Boulez.
Pierre Boulez n'a jamais visé la carrière de chef d'orchestre. Elle s'est imposée à lui par hasard et par nécessité. Sa formation s'est faite sur le tas, par le travail lent et obstiné avec les musiciens de la fosse du Théâtre Marigny. Plus tard, en raison de la carence de chefs d'orchestre acceptant de diriger des concerts consacrés à la création d'oeuvres nouvelles, Boulez est bien obligé de se jeter à l'eau. Un coup du sort, la maladie d'Hans Rosbaud, oblige Boulez à reprendre sa place de chef. Au début, on appelait Boulez pour familiariser les orchestres avec la musique récente. Mais comme on ne vend pas les abonnements de concert uniquement sur des créations, Boulez a dû se mettre au "grand répertoire".
Benoit van LANGENHOVE
Le Parsifal bric-à-brac de Schlingensief et Boulez ou le sacrilège à l’encontre du sacré...
L’interprétation bayreuthienne de Christoph Schlingensief et de Pierre Boulez est sans aucun doute marginale. En fait, elle est tellement “originale” que l’on a beaucoup de mal à s’y retrouver. Et c’est peut-être là le plus gros défaut de cette vision de l’oeuvre. Non pas qu’il faille se complaire dans ce que l’on connaît déjà - les mises en scène contemporaines sont là pour ouvrir de nouvelles perspectives, on l’a déjà dit - mais il faut tout de même garder un strict minimum de fil conducteur pour parvenir à atteindre justement ce sentiment particulier qui fait de Parsifal une œuvre si singulière.
Michèle ISAAC
Ah, Wagner ! Oh, Parsifal ! Ach, Schlingensief !
Le Walhalla n’est plus ce qu’il était. Monsalvat non plus. Il n’y a plus de saisons sur la colline sacrée. Rengaines bien connues ; nostalgie d’un passé glorieux, conservatisme frileux, éternel refrain de la querelle des Anciens et des Modernes, ou plus simplement décalage absolu
entre un certain public et l’évolution des conceptions artistiques du temps ? La mise en scène de Parsifal, créée en 2004 et reprise cette année à Bayreuth, semble accuser le divorce entre le pèlerin de La Mecque wagnérienne et l’univers jugé outrageux proposé par le plasticien et metteur en scène allemand, Christoph Schlingensief.
Depuis sa création il y a un an, cette mise en scène de Parsifal a beaucoup fait parler d’elle, au point d’éluder quelque peu la musique, malgré la présence de Pierre Boulez au pupitre2. Il sera d’ailleurs volontairement traité ici du travail de Schlingensief puisque lui seul semble avoir déclenché la polémique. L’avis est pratiquement unanime : le bazar visuel installé sur la Scène fait désordre.
Jean-Yves EISCHEN
Opéra et images
L'image semble décidément prendre une place croissante dans les spectacles scéniques. Diverses représentations théâtrales y ont eu récemment recours et le phénomène a gagné par ailleurs les productions d'opéra. Il en a été ainsi du Crépuscule des dieux à l'Opéra Royal de Wallonie, de La flûte enchantée à La Monnaie et de Tristan et Isolde à l'Opéra Bastille, qui font appel à des images respectivement filmiques, photographiques et vidéo. On peut voir dans cette démarche la préoccupation légitime d'un renouvellement de la mise en scène, tirant profit, en l'occurrence, des ressources offertes par des langages "modernes". Ce choix n'est toutefois pas, selon nous, sans poser parfois problème.
Jacques POLET
Hänsel und Gretel d'Englebert Humperdinck : un opéra à découvrir
Engelbert Humperdinck fait partie de ces compositeurs qui, dans les histoires de la musique, n’ont généralement droit qu’à quelques lignes en fin de chapitre. C’est d’autant plus curieux que son opéra Hänsel und Gretel est toujours une oeuvre très populaire en Allemagne et dans bon nombre d’autres pays. Il vient de plus d’être donné avec grand succès à l’Opéra de Flandre, preuve qu’il a tout à fait sa place chez nous aussi. On sait que pour les compositeurs germaniques de la génération qui a suivi Wagner, il était terriblement risqué de se hasarder dans le domaine de l’opéra. Richard Strauss y a magistralement réussi, mais il y en a eu d’autres, Alexandre von Zemlinsky par exemple, comme le Théâtre Royal de la Monnaie nous l’a magistralement rappelé l’année passée. Humperdinck mérite aussi le détour.
Thierry LEVAUX