© Jean-Joseph Benjamin-Constant : Portrait de Camille Saint-Saëns (Musée de la musique, Paris) (c) Wikipedia

En décembre dernier nous commémorions le centième anniversaire de la disparition du compositeur français Camille Saint-Saëns. Sa longévité lui a permit de côtoyer Wagner de son vivant.

Quels étaient les rapports entre les deux hommes ?

Pour vous faire une idée, nous vous proposons deux textes. Le premier, venu de l’inépuisable plume de Pascal Bouteldja du Cercle Wagner de Lyon, vous trace les grandes lignes de cette relation.

Le second, plus complet, nous est proposé par Jacques Bonnaure sur le site du Musée virtuel Richard Wagner.

Camille Saint-Saëns à la salle Gaveau, Paris, 5 novembre 1913. © Wikipedia

On célèbre aujourd’hui le centenaire de la mort de Camille SAINT-SAËNS

Né en 1835, il fut dans sa jeunesse un wagnérien « forcené »…, épithète dont s’est servi son ami Léon Leroy. Il rencontra même Wagner en 1861, qui fut admiratif de sa parfaite connaissance à l’époque de la partition de Tristan. C’est naturellement qu’il participa au premier festival de Bayreuth comme correspondant à l’Estafette, où Saint-Saëns était rédacteur musical. A son ami Leroy d’écrire : « Saint Saëns sait son Rheingold et tous les opéras de Wagner comme un prêtre sait son bréviaire ». A cette occasion, il écrira des lettres enthousiastes et dithyrambiques sur la création de la Tétralogie (Saint-Saëns assista au second cycle). Il conclura ses articles par cette judicieuse réflexion générale : « Que dire des gens qui se sentent gravement atteints dans leur patriotisme, à l’idée que Wagner fait exécuter en ce moment sa Tétralogie dans une petite ville de Bavière ? En vérité, le patriotisme a bon dos… A tout prendre, je préfère hautement ceux qui s’inclinent devant une étonnante supériorité et ne marchandent pas leur admiration, dussent-ils admirer de confiance, à ceux qui dénigrent de parti-pris… ». Celles-ci furent réimprimées dans son volume Harmonie et Mélodie (Paris, Calmann – Lévy, 1885), volume qui se conclue par ce jugement péremptoire : « Représenter Wagner comme un ennemi de notre pays est simplement absurde : il ne hait que les gens qui n’aiment pas la musique ». Disons mieux : « sa musique ». Le ton de cette véritable profession de foi sur la musique de Wagner jure avec les commentaires ultérieurs. En effet, après 1876, il se lancera dans une polémique contre Wagner qui durera encore jusqu’en 1920. Il rejettera systématiquement le wagnérisme, affirmant : « Parsifal, c’est du charivari ! ». Mais ce nationalisme ardent qu’il professe se nourrit moins d’une haine de l’Allemagne – où il continuera souvent à jouer – et de la musique de Wagner, que d’une lutte contre la « wagnéromanie » (le mot est de lui) qui envahit la France à la fin du siècle. On luit doit en 1916 le sulfureux Germanophilie (Paris, Dorbon Ainé, 1916), seule et unique publication française en volume pendant la Grande Guerre, consacrée à Wagner… Ce texte qui reprend la matière d’une série de cinq articles parus dans l’Écho de Paris du 19 septembre 1914 au 5 avril 1915, en fait un exemple-type du pamphlet de facture anti-wagnérienne.

Pascal Boutelja

Camille Saint-Saëns par German Vizulis – © Shutterstock

100ème ANNIVERSAIRE de la disparition de Camille SAINT-SAËNS
WAGNER ET SAINT-SAËNS

Un article par Jacques BONNAURE

En 1859, Camille Saint-Saëns fait la rencontre de Richard Wagner lors d’un séjour de ce dernier à Paris. Saint-Saëns fera vite partie des familiers de Wagner et sera notamment le premier à jouer des transcriptions de ses œuvres. Son pèlerinage à Bayreuth en 1876 lui inspire une série d’articles sur le projet lyrique titanesque de Wagner, et il devient l’un des grands défenseurs du compositeur allemand tendancieux. Mais lorsqu’une hégémonie culturelle germanique commence à envahir l’horizon musical français, lorsqu’une « wagnérolâtrie » domine l’attention française au profit de ses propres compositeurs, Saint-Saëns se réveille de son rêve wagnérien : « Je me suis cru moi-même wagnérien pendant un certain temps. Quelle était mon erreur et que j’étais loin du compte ! »

A l’occasion de la célébration du centième anniversaire de la disparition de Camille Saint-Saëns, Le Musée Virtuel Richard Wagner célèbre les rapports d’admiration et de distance entre le compositeur français et … Richard Wagner. Un article signé Jacque BONNAURE, éminent spécialiste de Saint Saëns qui nous fait l’amabilité et l’honneur de rejoindre le Panthéon de nos auteurs.

Parler de la relation entre Saint-Saëns et Wagner, c’est évoquer une période des plus critiques et des plus passionnantes de la musique française, mais également des plus troublantes voire des plus décevantes. On pourrait se demander si le titre inverse pourrait constituer un sujet de quelque intérêt : la relation entre Wagner et Saint-Saëns.

Or il se trouve que cette relation passionnelle fut très dissymétrique et il est évident que Wagner a beaucoup plus compté dans la vie de Saint-Saëns que le contraire. En outre une grande partie de cette aventure esthétique mais aussi politique s’est déroulée en l’absence de l’un des deux protagonistes, puisque cette relation prend un tour polémique voire carrément haineux alors que Wagner n’était plus là depuis des années.

Pour l’article dans son intégralité sur le site du Musée Virtuel Richard Wagner, cliquez ici.