La Monnaie

La version française de Salomé de R. Strauss

Un concert dirigé par Kazushi Ono, directeur musical de la Monnaie de 2002 à 2008, propose une rareté, la version française de Salomé, réalisée par Richard Strauss lui-même. Comme il le dit dans une lettre à son ami l’écrivain français Romain Rolland :

« Vous savez que j’ai terminé une Salomé en allemand d’après Oscar Wilde. Oscar Wilde a écrit Salomé en français et c’est de ce texte original que je voudrais me servir pour ma composition [nouvelle version]. Je ne veux pas confier le travail a un traducteur car je voudrais maintenir mot pour mot I‘original de Wilde; c’est pourquoi les phrases musicales doivent s’adapter au texte français… »

Cette version française de Salomé est crée I’Opéra de Paris en mars 1907 au cours d’une représentation privée. Durant le même mois, le Théâtre de la Monnaie le donne en représentations publiques.

De l’opéra, nous entendrons la Danse des sept voiles et la scène finale chantée par Elsa Dreisig, qui fut la fantastique interprète de Salomé au Festival d’Aix, cet été.

L’introduction du concert (19h15) sera donné par un de nos conférenciers, Benoit van Langenhove

Bozar, le dimanche 9 octobre à 20 heures

Le Chevalier à la rose.

Richard Strauss est un personnage agaçant. On a envie de se détourner de lui quand on pense à son goût pour le succès ou à ses faiblesses politiques durant le régime nazi. Mais on ne peut que l’aimer quand on écoute sa musique, même si les somptueux atours dont il la pare habillent parfois un vide sidéral.

C’est donc avec appréhension… que l’on court assister à une nouvelle production du Chevalier à la rose dont les sucreries, la volupté, la nostalgie précieuse produisent immanquablement leur effet. On y succombe avec réticences avant d’être enivré par ces jeux de dupes, on est troublé par le personnage travesti du Chevalier au moins autant que le Baron Ochs. Et l’on se laisse prendre par de cette « plaisanterie viennoise », par ce jeux de tromperie douce-amère et cruelle qui démasque la vulgarité et voit la Maréchale s’effacer devant la prime jeunesse de Sophie. Et on y succombe d’autant plus que le livret d’Hugo von Hofmannsthal est probablement l’un des plus beaux hommages à la femme, à sa peur devant l’âge qui s’avance inexorablement. Gênant Strauss ? Sans aucun doute, mais à part Mozart, aucun compositeur n’aura à ce point compris la femme. Enfin, ceci est un avis d’homme.

Le metteur en scène Damiano Michieletto situe cette immersion au cœur de la psyché humaine dans un monde onirique teinté d’humour et de surréalisme. La production mettra l’accent sur la psychologie des personnages en crise existentielle avec la solitude. Coupé en deux par un rideau, le plateau présente deux scènes, permettant de naviguer constamment entre le rêve et la réalité qui se répondent et se commentent. Des visions surréalistes jouées en arrière-plan comme autant de tableaux psychanalytiques révèleront les troubles, les envies, les angoisses des protagonistes avec la clarté symbolique d’un rêve ou d’un cauchemar. Bien plus qu’une pièce néoclassique rococo, Der Rosenkavalier dessine les contours de la condition humaine dans une société hypocrite où la solitude face au temps qui passe est notre pire ennemie.
La partition de Strauss – une des plus raffinées du répertoire – s’épanouira pleinement entre les mains du chef d’orchestre Alain Altinoglu.

Les introductions seront données par un de nos conférenciers, Benoit van Langenhove, 45’ avant le début des spectacles dans la Bonbonnière

La Monnaie, Der Rosenkavalier, du 28 octobre au 18 novembre 2022

Opéra de Paris

Salomé

La princesse de Judée, Salomé, s’ennuie au palais de son beau‑père, le roi Hérode. Sa curiosité s’éveille lorsqu’elle entend la voix de Jochanaan, prophète tenu prisonnier par Hérode qui en a peur. Obsédée par cet homme énigmatique et vertueux, Salomé est prête à tout pour le posséder, vivant ou mort. D’après la scandaleuse pièce homonyme d’Oscar Wilde, Richard Strauss livre, en 1905, l’œuvre qui devait confirmer sa place de successeur de Richard Wagner dans l’opéra allemand. « Danse pour moi, Salomé ». De cette injonction lubrique d’Hérode à la jeune fille découle l’une des plus emblématiques pages orchestrales de l’histoire de l’opéra : la danse des sept voiles. Un intermède hypnotique qui pourrait à lui seul résumer la mortelle ascension du désir qui parcourt cette partition à l’orchestration aussi riche que moderne. Une fulgurance d’une heure quarante où la metteuse en scène Lydia Steier convoque, pour ses débuts à l’Opéra national de Paris, l’essence décadente de l’œuvre.

Interview de la metteuse en scène Lydia Steier.

 

Opéra de Paris du 12 octobre au 5 novembre 2022

 

Opéra Royal de Wallonie – Liège

Il Turco in Italia entre au répertoire de l’Opéra Royal de Wallonie-Liège

À 22 ans, Rossini est déjà un compositeur confirmé et auréolé d’un immense succès pour ses opéras buffa auxquels il rend une pétillante jeunesse. Sur un livret de Felice Romani, l’intrigue qui met en scène un pacha berné est d’une rare finesse et pleine de fraîcheur.

Composé en 1814 comme dernier volet d’une trilogie turque, le public crut d’abord y voir la réécriture de la fameuse Italiana in Algeri et un auto-plagiat, un pasticcio : la pratique était courante. Il n’en était rien et l’on constata bien vite la nouveauté du sujet comme de la musique. La vocalité y est sublime et les ensembles sont traités avec maestria. Il Turco in Italia s’impose aujourd’hui comme un incontournable de l’art rossinien.

Selon le metteur en scène, Fabrice Murgia, « Il Turco in Italia est une comédie. Les personnages doutent eux-mêmes de ce qu’ils sont en train de vivre. La situation s’accélère et prend des proportions tant démesurées que théâtrales. Les personnages en arrivent à se déguiser, se confondre, se faire passer pour d’autres et se mélanger. Je voudrais pousser ce vertige de la mise en abîme plus loin en situant l’action sur un plateau de tournage aux allures de Cinecittà, sans époque définie, tellement les costumes nous confondent. L’image passera de la fiction à la réalité, tant et si bien que nous serons perdus dans un entre-deux troublant. Déambulant dans les coulisses d’un plateau, les chanteurs vivront ces séquences de tromperie et d’imbroglio en passant au travers de multiples références, issues du cinéma, de l’opéra ou d’ailleurs, depuis l’opéra-bouffe jusqu’au Soap Opera télévisé… »

Opéra de Wallonie Liège, du 21 au 29 octobre 2022