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Frédéric Pajak

Nietzsche au piano

Récit

Les Éditions Noir et Blanc, janvier 2024 – 96 pages – ISBN 978-2-88250-893-5 – 15 €

 

Nietzsche a quitté sa patrie en 1886. Il vit désormais entre Nice, Sils Maria et Turin, à la recherche d’un climat qui épargnerait ses nerfs, ses yeux, sa tête, son estomac. C’est un exilé ; il abomine l’Allemagne, sa langue, sa religion, sa cuisine. Il s’est débarrassé de Dieu et voilà qu’il veut provoquer la naissance d’un monde nouveau, inspiré par une esthétique nouvelle. Mais qu’est-ce que l’esthétique, quand on n’a que dédain pour l’architecture et la peinture ? C’est évidemment la musique. Il se déclare musicien avant tout, et c’est parce qu’il est musicien qu’il peut être philosophe. C’est donc par la musique qu’il veut dynamiter son époque et la civilisation judéo-chrétienne. Curieuse utopie que celle de ce solitaire intraitable, visionnaire, attaché à pourfendre le nihilisme.

La musique salvatrice ne sera pas la grande musique allemande, celle de Bach et de Beethoven qu’il admire ; et encore moins celle de Wagner, qu’il a fini par exécrer. Non, cette musique du monde nouveau sera méditerranéenne ; elle est à retrouver dans les chœurs antiques et dionysiaques de l’Antiquité — dont toute trace est effacée. L’utopie de Nietzsche est extravagante ; lui-même ne pouvait que s’y perdre. À sa vision de la musique est attaché irrémédiablement son destin ô combien tragique.

Frédéric Pajak est né en 1955 dans les Hauts-de-Seine. Il a publié une vingtaine d’ouvrages, souvent écrits et dessinés, dont : « Le Chagrin d’amour », « Humour – une biographie de James Joyce », « Nietzsche et son père », « Nervosité générale », « Mélancolie », aux PUF ; « La Guerre sexuelle », « J’entends des voix » et « Autoportrait », chez Gallimard. Il est l’éditeur des Cahiers dessinés.
Après « L’Étrange Beauté du monde » et « En souvenir du monde », réalisés avec Lea Lund, après la nouvelle édition de « L’Immense Solitude » et les neuf volumes du « Manifeste incertain », les Éditions Noir sur Blanc poursuivent la publication des œuvres de Frédéric Pajak. Il a reçu, pour le Manifeste incertain 3, le prix Médicis Essai 2014 et le prix suisse de littérature 2015 ; ainsi que le prix Goncourt de la biographie 2019 pour le «Manifeste incertain 7».
Il reçoit le Grand Prix suisse de littérature 2021 pour l’ensemble de son œuvre.

 

Jean-Christophe Branger

Jules Massenet

Fayard, février 2024 – 1080 pages – EAN 9782213704852 – 49 €

 

Auteur de deux piliers du répertoire lyrique (Manon, Werther), Jules Massenet (1842-1912) reste un compositeur méconnu. S’il occupe une place éminente en son temps, ses œuvres, souvent adulées des chanteurs et des amateurs d’opéra, ont suscité de vastes polémiques, qui perdurent. Le présent ouvrage apporte un éclairage inédit sur sa vie et sa carrière à la lumière de nombreuses sources inédites.
Alors que Wagner s’impose comme un modèle puissant, Massenet s’affranchit de cette figure tutélaire en se forgeant un style appelé à faire école jusqu’à Debussy, Puccini et Poulenc. Il fréquente les artistes majeurs de son époque, comme Maupassant ou Proust, qui façonnent certains de leurs personnages en s’inspirant de son caractère qui détonne dans un univers profondément masculin.
À la fois mondain et solitaire, fragile et superstitieux, Massenet se réfugie dans son travail qui atteste d’une force de caractère peu commune et d’un artiste en quête de sa propre vérité.
Figure emblématique d’une jeune République qui s’érige sur les décombres du Second Empire, il produit une œuvre kaléidoscopique, miroir d’une société en pleine mutation qui fait étrangement écho à la nôtre. Après la défaite de 1870, son œuvre exalte les valeurs et racines culturelles de la France, mais interroge aussi la place des femmes et de la religion dans la société.

Jean-Christophe Branger, agrégé de musique et docteur de la Sorbonne, est professeur de musicologie à l’université Lumière Lyon 2. Ses recherches portent sur la musique française sous la IIIe République et Jules Massenet en particulier. Après avoir soutenu une thèse consacrée à Manon (Serpenoise, 1999), il a publié des articles étudiant la carrière et la musique de Massenet, une édition critique de ses écrits (Mes souvenirs et autres écrits, Vrin, 2017) et plusieurs de ses œuvres méconnues ou inédites (Symétrie).